Blablabla rien à faire m'ennuie gni.
>>>Bukowski, Le ragoût du septuagénaire<<<
personne, et j’étais donc coincé dans cette chambre avec
pour seul désir celui de
boire, de contempler le papier qui se décollait et la
moquette bouffée
par les pas de ceux qui étaient déjà passés là,
pris au piège…
oui, je les visualisais presque, un par un : une
vieille femme avec un
châle gris autour du cou, un ivrogne d’âge mûr, un violeur
d’enfants
refoulé au long nez jaune, un borgne, une jeune fille
qui
se prenait parfois pour un cygne…
hmmmm…
je les voyais presque, un à la fois, qui arpentaient cette
moquette ou
qui ouvraient et refermaient les tiroirs de cette commode.
horrible…
oui c’était horrible, étriqué et écoeurant, aussi proche de
zéro qu’on peut le
mesurer…
qu’est ce qu’ils pouvaient faire ? pas même
hurler…
qu’est ce qu’ils pouvaient faire ? l’immensité de
l’existence : c’était comme être un
cafard de nulle part… qui rampe… qui fait quoi ?
ouvrir un tiroir
chercher quoi ? un
mouchoir, un
revolver, quelque chose d’
utile…
qui sait ?
pour moi, l’humanité a échoué plus que moi
mais
j’étais triste pour
eux… et moi, je ne voulais qu’un espace pour m’y
reposer, une minuscule chute d’eau qui clignote, une
immunité temporaire…
elle était là ?
pas tout à fait, la chambre me reliait au haïssable et
à mon amour du haïssable : comme de la merde dans un
égout
emportée avec les autres déchets…
tu ne ris jamais beaucoup, hein
vieux ?
oh si, je ris, mais laisse-moi continuer : à parler de
la folie, on
devient idiot, allons-y… c’est comme une enveloppe
protectrice…
____________________________________________________________________________________________________
Ce matin j’me suis levée genre à la bourre parce que je suis
djeunz et que tous les djeunz se lèvent à la bourre, ça rend cool. Du coup je
suis partie en oubliant mes clefs mais tant pis. Arrivée devant le lycée (parce
que, je vais encore dans un lycée pour suivre des cours de grammaire,
chouette la vie) j’ai vu deux filles de ma classe qui parlaient de faire des
pompes devant la télé pour garder un corps de rêve telle Barbie, alors moi j’ai
juste pris mes feuilles de cours puis j’ai commencé à lire pour faire style je
vis dans un monde parallèle, j’apprends ma leçon tu vois.
Après sur ma table j’ai même pas dormi, j’ai honte de le dire mais en fait je m’affale en cours parfois des fois, tout pareil qu’une djeunz koule en puissance sans pudeur. Passons. A la place Anne m’a raconté ses conneries de coule. Je vis entourée de coules aussi hein, j’m’excuse. Donc bref elle est un peu teubé mais ça lui arrive d’être drôle quand même. Enfin pas drôle du genre au top de l’hilaritude désopilante et diurétique mais bon, divertissante. A petite dose toujours faut pas déconner non plus. On s’est moquée d’elle avec Pauline, gentiment, parce qu’on est des filles aimables. Et puis que de toute façon c’est exactement ce qu’elle recherche.
Ma mère qui travaillait toujours pas m’a ouvert la porte familiale. Après j’étais obligée de lui raconter ma life de pourquoi j’existais chez elle et tout. Du coup j’ai pris mes clefs et celles de la boîte aux lettres, j’ai été chercher la lettre de Damien qui s’y trouvait puis je suis allée reposer les clefs, sauf que comme je suis une débile congénitale j’ai laissé mes clefs à moi et j’me suis barrée avec celles de la boîte aux lettres.
J’ai dessiné un mouton à Soizic pour qu’elle puisse l’accrocher en étendard dans sa chambre-cimetière d’internat. Après j’ai conversé sur les banalités de la vie avec elle alors que j’aime pas ça, y’a mon cerveau qui tourne à vide et mes paroles sont pré-moulées. Ouais bon.
Clotilde s’est tapée l’incruste avec nous, moi je l’aime pas. Elle est hypocrite, toute en sourires qui font des rides à force de défigurer son beau visage sans raison apparente, juste pour la sociabilité. Elle me fait assez penser à ces mollusques plein de mollesse et capables d’adopter n’importe quelle forme pour pouvoir rentrer dans le moule de leur nouvelle carapace sociale. Cette fille c’est pas une fille, c’est un bigorneau.
Dans un ultime effort j’ai voulu aller la poster pour aller jusqu’au bout de mon engagement un peu, mais finalement j’avais pas d’enveloppe, donc j’ai fouillé mes poches et j’ai trouvé 80 centimes pour acheter un petit pain. Je l’ai mangé en solitaire sur un banc tagué d’un square, et puis comme je m’ennuyais toujours j’ai fumé une clope. En admirant les volutes de la fumée se perdre dans l’air carboné, des questions métaphysiques concernant le sens de la parole chez l’immonde fange des abrutis sans cervelle peuplant cette planète me vinrent.
C’était relou donc j’ai décidé de rentrer.
Bref, sinon je vais mal. Mais ça va s'arranger très prochainement.
Jeudi.
Et là mes ptits potes, ça va être la folie. Youpi.
Bande-Son : What Goes On / The Velvet Underground